Quelle autochtonie pour les peuples autochtones ? Langues du droit et ingénieries institutionnelles

Inscriptions Obligatoires

Les peuples autochtones expriment depuis plusieurs décennies leur volonté que soient reconnus leurs particularismes culturels. Malgré leur éloignement géographique et culturel, d’un bout à l’autre de la planète, tous les peuples autochtones ont un point commun majeur : ils sont fortement liés à leurs territoires traditionnels et à leur environnement naturel, à leurs propres systèmes économiques, politiques et sociaux ainsi qu’à leurs langues, leurs cultures et leurs croyances.

Dans le cadre de l’ONU, le terme peuple désigne une entité sociale dotée d’une personnalité juridique : le peuple est souverain sur son territoire. Toutefois, si la Déclaration sur les droits des peuples autochtones énonce des droits relatifs aux terres et aux ressources ainsi que le droit à l’autodétermination, ces droits sont associés à des obligations étatiques car ces groupes ne peuvent pas se prévaloir d’un statut qui leur permettrait d’exiger leur mise en œuvre. S’ajoute à cela que les évolutions du processus normatif sur les peuples autochtones au sein de l’ONU ont conduit à utiliser le qualificatif « autochtone » pour signifier l’oppression ethnique et la marginalisation économique. Dans ce cadre, les droits culturels sont principalement reconnus en vue de garantir que les membres de groupes autochtones ne soient pas discriminés par rapport à ceux des groupes majoritaires.

Ces évolutions questionnent le qualificatif « autochtone » quant à son impact sur les catégories, les principes et les droits inscrits dans le cadre du droit international.

A cet, effet le colloque propose de saisir la trajectoire du terme « autochtone » à partir du langage juridique et des pratiques institutionnelles utilisés par les différents acteurs du processus normatif.
Le colloque, suivi d’un atelier, mobilise des politistes, des juristes, des anthropologues dans le cadre de onze interventions réparties sur deux axes (voir programme). Issu de réflexions internes à l’UMR 7206, il s’appuie sur l’expérience des membres des équipes du MNHN ainsi que sur celle des intervenants extérieurs invités.

Sur la base des instruments juridiques existants, la reconnaissance de l’identité des peuples autochtones, le droit de conserver leur territoire, leur langue, leur culture et de développer leurs propres institutions sont soumis à la volonté de l’Etat. Le caractère régalien ainsi que le contexte de marginalisation dans lequel s’inscrit la procédure interrogent le « peuple » dans son contenu et met en relief la portée de la reconnaissance de l’autochtonie sur l’idée de société, en tant que groupe social et en tant que nation, Axe 1 : Ce que l’autochtonie fait à la notion de peuple.

Ceci illustre l’élaboration et la conception d’un dispositif juridique spécifique permettant la réalisation d’un objectif stratégique global : un cadre du droit où le langage juridique et les pratiques institutionnelles interviennent, en quelque sorte comme une ingénierie, dont la discussion sera l’objet de l’Axe 2 : Ce que « Peuple autochtone » fait à l’autochtonie.

Cet axe permettra de mettre en relief que, si au sein des forums internationaux, les revendications visent principalement à se voir reconnaître l’autodétermination, c’est-à-dire le droit de définir ses propres normes et priorités, la substance de ce droit tend à s’adapter à l’identité du bénéficiaire potentiel. La réduction du terme « autochtone » à certaines pratiques culturelles (essentialisation) conduit à envisager l’autochtonie autour d’identités fixes, anciennes et permanentes qui déterminent le vécu, les pratiques et les perspectives d’avenir des individus. La nature des droits de chacun pourrait donc varier en fonction de sa communauté (culturelle) d'appartenance, d’autant que cette entité ne bénéficie d'aucune reconnaissance juridique.

Le colloque se terminera avec une restitution des deux axes qui nous permettra de problématiser les pratiques soulevées pour inviter à en discuter, de manière plus approfondie, dans le cadre d’ateliers dont le premier se tiendra le lendemain.

En cherchant à promouvoir, à l’intérieur du cadre national existant, non seulement l’effectivité des droits individuels communs à tous les citoyens mais aussi la reconnaissance de droits collectifs spécifiques réservés aux seuls peuples autochtones, on assiste à diverses constructions tant juridique (via la protection de la nature, des territoires et des savoirs) que politique (au travers de la représentation nationale) ou sociale (via la construction de mécanismes issus d’une adaptation du droit coutumier) qui, certes, font montre « d’innovations » mais qui interrogent aussi, et par l’expérience, la substance de la reconnaissance. Ces ateliers, en permettant de relever les conséquences des pratiques juridiques et institutionnelles, participent à l’objectif d’identifier des axes de recherche pertinents à développer.

Membres du comité d’organisation

Nadia Belaidi, CR CNRS, UMR 7206

Marieke Blondet, IR, AgroParisTech Nancy, UMR SILVA

Pierre Spielewoy, doctorant, UMR 7206

 

 

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